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La Cave aux Crapauds
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5 décembre 2006

On exhume... The Witchmaker de William O. Brown (1969)

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Il est des grands films injustement oubliés et d’autres qui sans être des chefs d’œuvres, sont passés dans l’anonymat le plus complet, et méritent qu’on s’y attarde pour quelques fulgurances, quelques scènes, ou simplement parce qu’ils dégagent un charme indéniable. Ces derniers constituent un pan important de l’Histoire du cinéma, à l’intérêt non négligeable, d’où émergent régulièrement de petits trésors au budget plus que limité, pour lesquels leurs auteurs tentaient de concilier contraintes commerciales et inspiration personnelle.

The Witchmaker de William O. Brown appartient à cette deuxième catégorie. Réalisé en 1969, ce pur produit d’exploitation et plus particulièrement de witchploitation, est au carrefour du nudie et du gothique avec comme particularité un décor tout ce qu’il y a de fantasmatique et propice à l’envolée visuelle : le bayou.

Le witchmaker en question a les traits de Luther le Berserk, un sorcier maléfique à l’expression hallucinée, vivant dans une caverne au milieu du marais et sacrifiant des jeunes filles au culte de Satan en les suspendant dans les arbres avant de les vider de leur sang. Une équipe de parapsychologues vient louer une petite cabane au cœur de cette contrée peu avenante, pour élucider ces crimes, accompagnée d’une attirante médium, qui visiblement intéresse notre adepte de Belzebuth…

Imaginez un peu la rencontre de 2000 maniacs et de La Chute de la maison Usher et vous aurez une petite idée de l’univers de Witchmaker. En effet, l’ambiance sud profond, un peu poisseuse et dégénérée, avec son humour à froid (le héros à l’homme qui les dépose en barque : - avez-vous le téléphone ? - moi, oui, mais pas vous !), le jeu approximatif d’acteurs aux bavardages somnifères, les habitudes vestimentaires, les actrices qui ne perdent pas une occasion de se mettre en maillot de bain même lorsqu’il n’y a pas de soleil, ne sont pas s’en rappeler Hershell Gordon Lewis ; le rapprochement avec Corman tient quant à lui à son atmosphère féérique, son aptitude à baigner le décor dans la brume, à faire errer ses personnages dans des forêts superbement fantomatiques mises en valeurs par une photo bleutée et un bel emploi du scope. L’atmosphère n’en est que plus flottante. Brown utilise à merveille les paysages marécageux, jusqu’à une toute fin belle et cruelle.
Witchmaker laisse donc une double sensation, mélange de kitsch ridicule désopilant (ah, cette assemblée des sorcières immémoriales en paillettes livrées à l’orgie satanique !), de poésie diaphane (l’héroïne somnambule dans sa robe rouge perdue dans le bayou), et de charme morbide (les corps féminins suspendus dans les arbres). Autre particularité de cette petite œuvre, la sorcellerie y est tellement présente qu’elle évacue tout recours à la symbolique chrétienne : la toute puissance du diable ne laisse plus de place à l’espoir de la prière.

Entre maladresse et invention, amateurisme et poésie, entre plaisir coupable et véritable intérêt, cette histoire de faiseur de sorcières d’une rareté absolue est donc vivement recommandée.

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